Objet du mois
Photographie anonyme de Joséphine Baker
Photographie anonyme
Tirage photographique d’époque au gélatino-bromure d’argent sur papier baryté
6,51 x 10,5 cm
Inv. 2000/60/98
Fermeture exceptionnelle du musée le 25 décembre et le 1er janvier.
Merci de votre compréhension.
A la fin de l’été 1925, Joséphine Baker (1906-1975), de son vrai nom Freda Josephine McDonald, arrive à Paris avec une troupe de Broadway, pour danser dans le spectacle de music-hall, la « Revue Nègre », au Théâtre des Champs-Élysées. Cette production à succès est la première d’une série qui va l’élever au statut de première star afro-américaine. Le musée de l’Air et de l’Espace conserve quelques photographies de cette figure vedette incontournable des années folles, dans un contexte aéronautique, loin des planches mais néanmoins familier pour cette figure majeure des arts du spectacle du XXème siècle.
Cette image présente Joséphine faisant le spectacle sur l’aile d’un Lioré et Olivier 213 de la compagnie Air-Union sur l’aéroport du Bourget. Elle se met en scène dans une posture provocatrice de « la danse sauvage », un tableau du spectacle la « Revue Nègre ».
Une autre passion anime l’artiste. Férue de sport et de vitesse, elle s’oriente vers l’aviation après l’obtention de son permis de conduire automobile en 1927. Le transport aérien lui donne le sentiment de dépassement de sa condition en étant « plus que des rois » tel qu’elle le confie à une journaliste de la Vie Aérienne. Ainsi, elle obtient son brevet de pilote fin mai 1937. Sa notoriété et son succès en France lui ont permis de s’affranchir des multiples obstacles, notamment financiers, qui mettront un terme à la carrière de bien d’autres femmes contraintes de renoncer à leur souhait de voler.
Autre lien méconnu avec l’aviation, le 13 septembre 1906, l’aviateur Santos-Dumont effectue son premier vol historique à Bagatelle. Au cours d’une allocution suivant son exploit, il aurait prononcé la phrase : « J’ai deux amours, mon pays et Paris ». Durant les années 1930, Joséphine Baker interprète le titre mondialement connu comprenant cette phrase. Hasard ou volonté des paroliers, l’histoire ne le dit pas…
Naturalisée française en 1937, elle met sa passion pour l’aviation au service de sa nouvelle patrie d’adoption, en suivant la formation Infirmière Pilote Secouriste de l’Air (IPSA) de la Croix-Rouge française. Recrutée comme agent de renseignement dès 1939, Joséphine Baker contracte un engagement dans l’Armée de l’Air en mai 1944, dans le cadre des Formations Féminines de l’Air en tant que sous-lieutenant, officier de propagande, rédactrice. Elle effectue alors des tournées théâtrales organisées au profit des œuvres sociales, des unités engagées, prisonniers ou déportés, contribuant ainsi au maintien du moral des troupes, de l’Afrique du Nord en passant par le Moyen-Orient et jusqu’en Allemagne. Le 6 juin 1944, elle est passagère d’un Caudron C.440 Goéland qui est contraint d’amerrir au large de la Corse. Les rescapés sont secourus par des tirailleurs sénégalais. Deux d’entre eux périssent victimes de leur bravoure. Cette tragédie met fin à sa passion pour l’aviation et elle ne reprendra plus jamais les commandes d’un avion.
Après la guerre, Joséphine Baker reçoit de multiples décorations militaires et civiles ces engagements et le 30 novembre 2021, elle fait son entrée au Panthéon.
Texte : Vincent Dhorne
Illustration : © Musée de l’Air et de l’Espace – Aéroport de Paris-Le Bourget