Après la capitulation de Sedan, le 2 septembre 1870, les troupes prussiennes progressent vers Paris qui est assiégée à partir du 19 septembre. Très rapidement, l’administration des postes organise un service de ballons afin de rétablir les communications avec la province. Le départ du premier aérostat a lieu le 23 septembre et, le 7 octobre, le ministre de l’intérieur Léon Gambetta parvient à s’échapper de la capitale pour rejoindre Tours où s’est repliée une délégation du gouvernement de la défense nationale.
Episode emblématique du siège de Paris, le départ de Gambetta a été représenté dans de nombreuses œuvres. L’esquisse peinte conservée au musée de l’Air et de l’Espace se démarque de ces représentations souvent convenues par son caractère instantané, l’artiste ayant cherché à restituer l’atmosphère de la scène, juste avant le départ du ministre. Attribuée à Adrien Tournachon, frère du photographe et aéronaute Nadar, la conception de l’œuvre laisse penser que son auteur vécut ce moment historique. Elle fait écho au récit de Victor Hugo qui se trouvait parmi les témoins :
Une certaine foule entourait un grand espace carré, muré par les falaises à pic de Montmartre. […] On chuchotait dans la foule : Gambetta va partir. J’ai aperçu, en effet, dans un gros paletot, sous une casquette de loutre, près du ballon jaune, dans un groupe, Gambetta. Il s’est assis sur un pavé et a mis des bottes fourrées. Il avait un sac de cuir en bandoulière. Il l’a ôté, est entré dans le ballon, et un jeune homme, l’aéronaute, a attaché le sac aux cordages, au-dessus de la tête de Gambetta. Il était dix heures et demie. Il faisait beau. Un vent du sud faible. Un doux soleil d’automne. Tout à coup le ballon jaune s’est enlevé avec trois hommes dont Gambetta. (Choses vues, Paris, Calmann Lévy, 1900, p. 282).
L’évasion spectaculaire du ministre connut une suite mouvementée : après avoir essuyé des tirs allemands, le ballon finit son voyage dans l’Oise où il s’accrocha dans les branches d’un chêne, sans dommages pour ses passagers.