André Turcat, pilote d’exception.
Monsieur André Turcat, une des grandes figures de l’aviation française, est décédé lundi 4 Janvier 2016. Agé de 94 ans, André Turcat laisse dans son sillage de nombreuses prouesses aéronautiques. C’est un acteur incontournable de la renaissance de l’industrie aéronautique française au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Issu de la promotion X 40 (Polytechnique), André Turcat intègre les rangs de l’armée de l’Air et obtient son brevet de pilote sur Arado Ar’96 en 1947, Nord 1000 et Sipa S.10. En parcourant les halls d’exposition du musée de l’Air et de l’Espace, on peut s’attarder sur les avions qui ont marqué la carrière de ce pilote d’exception. Après un engagement dans les forces aériennes de la France libre, il continue sa carrière militaire et participe au conflit en Indochine où il démontre ses qualités de pilote aux commandes d’un avion de transport C-47 dont on peut voir un exemplaire dans le hall 39/45 du musée.
André Turcat intègre le Centre d’Essais en Vol de Brétigny-sur-Orge et obtient le brevet de pilote d’essai. En 1954, il rejoint la société Nord Aviation. Dans le hall des prototypes, se dresse le Nord Aviation 1500-02 « Griffon II », intercepteur léger supersonique, un des premiers avions au monde à propulsion mixte par turboréacteur et statoréacteur avec lequel André Turcat bat le record international de vitesse sur circuit le 25 février 1959.
Après avoir rejoint la société Sud-Aviation, il effectue le premier vol du prototype de l’avion Concorde à Toulouse-Blagnac, le 2 mars 1969. Le 30 Juin 1973, à l’occasion d’une mission d’observation de l’éclipse totale solaire coordonnée par l’astrophysicien Pierre Léna, André Turcat offrira au supersonique franco-anglais son dernier rendez-vous avec l’histoire : Concorde 001, croisant à la vitesse de l’ombre de la Lune sur la Terre, donnera la possibilité d’observer le disque solaire pendant 80 minutes, soit dix fois plus longtemps qu’une observation astronomique au sol. Après cet exploit rendu possible grâce à ses qualités de pilote André Turcat remet symboliquement les clés du Concorde 001 au général Pierre Lissarague, alors directeur du musée de l’Air et de l’Espace.
Le musée de l’Air et de l’Espace a eu le plaisir et l’honneur d’accueillir André Turcat en ses murs. La dernière fois le 29 juin 2013, lors de l’inauguration de l’exposition permanente retraçant l’utilisation du prototype de l’avion Concorde pour l’étude de ce phénomène astronomique.
André Turcat a vécu plusieurs vies. En plus d’avoir été pilote d’essais du Concorde ainsi que le premier à avoir fait voler l’oiseau supersonique en 1969, André Turcat a œuvré à la création de l’académie de l’Air et de l’Espace et a été deux ans député européen RPR, avant de devenir licencié de théologie. Homme incroyable, il était, pour reprendre les mots de Messieurs Sparaco et de Chambost* « le seul polytechnicien qui ait pu signer, notamment, un cours de mécanique du vol, une étude savante sur un sculpteur français de la Renaissance espagnole, un roman sur le sujet, et dirigé des morceaux choisis de la Bible, avec des travaux pratiques en hébreu. Du coup, on est embarrassé de se limiter ici à la brève évocation d’une décennie de vol d’essais ».
* Pierre SPARACO et Germain CHAMBOST, Une épopée française, les créateurs de l’aviation nouvelle 1950-1960, Edition Pascal Galodé, 2010.